Des mercenaires colombiens sur le front contre le M23 ?
Alors que le conflit armé dans l’Est de la République démocratique du Congo ne cesse de s’aggraver, une nouvelle information relance les débats autour de l’implication d’acteurs étrangers dans cette guerre. Des mercenaires colombiens, recrutés par la société militaire privée américaine Blackwater, seraient arrivés sur le territoire congolais pour appuyer les Forces armées de la RDC (FARDC) face aux rebelles du M23. Ces hommes, selon des sources sécuritaires concordantes, ont été aperçus dans la ville de Kalemie après un déplacement depuis Kisangani et Kindu.
Leur arrivée aurait été orchestrée avec une grande discrétion, selon plusieurs témoins sur place. À peine débarqués au port international de Kalemie, ces soldats étrangers auraient été dirigés vers la ville d’Uvira, point stratégique proche de la frontière burundaise. C’est là qu’ils doivent constituer une coalition avec les militaires congolais, les troupes burundaises déjà déployées dans la zone, et les combattants Wazalendo, pour une éventuelle offensive visant à sécuriser les villes de Goma et Bukavu, toutes deux sous forte pression du M23.
Cette initiative du gouvernement congolais s’inscrit dans une stratégie plus large d’externalisation de la sécurité nationale, amorcée il y a plusieurs mois. Après le retrait peu glorieux de mercenaires roumains, mis en déroute par les forces du M23, Kinshasa semble désormais miser sur les compétences militaires sud-américaines. Une approche qui n’est pas sans susciter des controverses, notamment sur la souveraineté militaire et la légalité du recours à des armées privées étrangères.
Au cœur de ce dispositif se trouve Erik Dean Prince, le fondateur de Blackwater, une figure connue pour ses opérations controversées en Irak et en Afghanistan. En janvier dernier, Prince aurait signé un accord avec le gouvernement congolais, officiellement centré sur la sécurité des sites miniers et le contrôle des flux fiscaux. Toutefois, des sources rwandaises, notamment le média IGIHE, affirment que ces accords masqueraient une mission bien plus offensive : celle de recruter et envoyer des mercenaires colombiens sur le champ de bataille congolais.
La présence de ces combattants étrangers dans un conflit déjà complexe soulève de nombreuses questions. D’un côté, elle pourrait représenter un renforcement militaire crucial pour les FARDC, affaiblies par des années de combats et de manque d’équipement. De l’autre, elle risque de provoquer des tensions diplomatiques supplémentaires, notamment avec les pays voisins déjà impliqués de manière directe ou indirecte dans le conflit, comme le Rwanda, souvent accusé de soutenir le M23.
Enfin, la situation reste suspendue à un éventuel accord politique entre les deux camps, actuellement en négociation à Doha, au Qatar. Mais tant qu’aucune solution diplomatique ne se concrétise, la militarisation du conflit se poursuit, avec une internationalisation de plus en plus assumée. L’arrivée des mercenaires colombiens pourrait ainsi devenir un tournant, non seulement sur le terrain, mais aussi dans l’image que renvoie désormais cette guerre à l’échelle mondiale : celle d’un conflit local devenu enjeu géopolitique global.